mercredi 6 mai 2020

Le quinquina


Le Comité d’histoire de la ville de paris propose, un document, en résonnance avec l’actualité et éclairé par un historien. 
Jusqu’aux années 1960-70, la publicité vantait les vertus fortifiantes des boissons alcoolisées l’argument « hygiénique » était une arme publicitaire courante pour les vins et apéritifs. Aujourd’hui, depuis la loi Évin de 1991 chacun sait ce qu'il en est,  l’abus d’alcool est dangereux pour la santé.  
Stéphane Le Bras est maître de conférences en histoire contemporaine à l’Université Clermont Auvergne. Il expose dans le texte qui suit les usages de la quinine, dont l’hydroxychloroquinine, au cœur des controverses depuis quelques semaines, contient un dérivé de synthèse et qui entre dans la composition de boissons dites "apéritives".

Publicité pour le Quinquina Monceau (1896)
Sur cette affiche, on reconnaît Félix Faure, président de la République (1895-1899).

"La controverse autour du Professeur Raoult et de son traitement contre le Covid19 a remis au goût du jour une molécule bien connue des Français, la quinine. Celle-ci, par son principe actif contre le paludisme, est administrée depuis des décennies sous des formes diverses à tous les touristes se rendant dans les zones tropicales et subtropicales. Avant eux, militaires et colons envoyés aux quatre coins du globe en consommaient également pour lutter contre la maladie, notamment en Algérie à compter des années 1830-1840.Surtout, la quinine, extraite du quinquina, un arbuste originaire d’Amérique du Sud, rentre depuis la première moitié du XIXe siècle dans la composition de vins thérapeutiques du même nom, les vins de quinquina. Ces vins, écoulés dans un premier temps dans les pharmacies et permettant de combattre les fièvres, connaissent un grand succès commercial à compter des années 1880. Désormais vendus par les bistrotiers et les épiciers, les « Quinquinas » deviennent la prisée des classes bourgeoises et populaires urbaines. C’est alors la grande mode des boissons toniques et hygiéniques, censées améliorer la santé et permettre de surmonter fatigues, digestions difficiles et fièvres passagères (comme la Suze, à base de gentiane, ou le Vin Mariani, à base de feuilles de coca). Au tournant du XXe siècle, le Quinquina est alors l’un des apéritifs préférés des Français (avec l’absinthe avant son interdiction en 1915), pour devenir l’apéritif star des années 1920 aux années 1950 (jusqu’à 70 millions de litres consommés par an).
Portés par de grandes marques nationales comme Saint-Raphaël, Dubonnet ou Byrrh, mais également des productions locales (Quinquina Monceau à Paris) ou des marques distributeurs (Kina Rok de Nicolas), les Quinquinas se déclinent en deux variétés, selon qu’ils proviennent de vins blancs ou rouges dont on a arrêté la fermentation et dans lesquels ont macéré des écorces de quinquina. Outre leur goût, ils tirent avantage de l’aura de produit bénéfique et fortifiant pour la santé, un discours largement propagé par les marques et leurs publicités, légitimé par les pouvoirs publics. En 1897, un concours lancé par Saint-Raphaël récompense le poème suivant : « Si tu veux te jouer du microbe homicide ; Si tu veux ici-bas prolonger ton séjour ; Si tu veux acquérir la force d’un Alcide ; Bois du Saint-Raphaël Quinquina chaque jour ». Une dizaine d’années plus tard, le conseil de médecine du ministère de l’Intérieur autorise la marque à l’exportation en Russie parmi les produits pharmaceutiques. Ainsi, jusqu’à son déclin dans les années 1970, le Quinquinas apparaît comme un remède curatif ou préventif à de nombreux maux (choléra dans les années 1830, tuberculose dans les années 1860, grippe espagnole en 1918-1919, anémie ou névroses dans les années 1920-1930, fatigue chronique dans les années 1950). En ce sens, il perpétue les attentes populaires dans les traitements miracles et recoupe des polémiques très actuelles."
ref: ville de Paris

À votre santé!
Et pour faire bonne mesure:
https://www.youtube.com/watch?v=ed3BG3cb7KQ




Aucun commentaire:

Enregistrer un commentaire