mardi 14 juin 2022

Provence terre de cinéma (2)

    Un des hauts lieux du cinéma: les studios de la Victorine à Nice.



Dès le tournant du siècle le cinéma devient une affaire sérieuse. De curiosité et d'attraction de foire, il devient rapidement outil au service de la curiosité et de la connaissance. Les frères Lumière engagent des opérateurs qui ont pour mission de parcourir le monde et de ramener des images. 



Puis rapidement on veut raconter des histoires, réelles ou inventées. Premiers scénarii et reconstitutions de moments spectaculaires d'histoire et de faits divers (ex le mystère du Masque de fer, les crimes célèbres…). Ainsi nait le cinéma de fiction.


À partir de là, les Lumière se désintéressent du cinématographe. Peu d'avenir pensent-ils… ils considèrent leur invention comme juste un divertissement de foire peu compatible vraisemblablement avec l'idée qu'ils ont de leur personne de grands bourgeois. Comme quoi on peut être ingénieurs de génie et peu visionnaires.


La Riviera est en vogue et Nice est une station très à la mode à la fin du siècle et au début de l'autre elle attire tout comme Hyères les gens riches et les artistes. Les conditions pour faire des films sont excellentes : sont sur place commanditaires et comédiens. Le climat est propice,  excellente luminosité,  vents relativement modérés facilitant l'installation et conservation des décors alors en partie constitués de toiles peintes montées sur cadres donc extrêmement fragiles. 


                                      Anouk Aimée à la Victorine

La ville attire donc les pionniers. Les studios se multiplient avec plus ou moins de bonheur. Six studios se signalent par leur longévité.  Le premier est celui de la route de Turin, exploité par Pathé de 1910 à l’aube du parlant en 1930. Avant 1914 y sont tournés de nombreux films, films comiques, films animaliers drames et comédies. C’est là que Jacques Feyder réalise un de ses chefs-d’œuvre du muet, Carmen (1926).
Mais les studios mythiques resteront ceux de la Victorine sur la colline de Cimiez . 

Etablis en 1919 sur une ancienne propriété horticole ayant appartenue à Victor Masséna descendant du maréchal d'empire. Il est pratiquement impossible de dénombrer les films tournés à Nice et à la Victorine des origines à nos jours, du cours métrage au téléfilm. On parle en milliers. 

Les plus grands réalisateurs internationaux y sont passés. Citons pour le muet: l'Alfred Hitchcock des premières années, Marcel L'Herbier pour les plus connus. 
Pour le parlant après 1927: Raymond Rouleau, Christian-Jaque, Abel Gance, Jean Grémillon, Jean Delannoy, Marc Allégret, Marcel Carné et plus récemment Roger Vadim, Jacques Tati, Alain Cavalier, François Truffaut, Georges Lautner et à nouveau Alfred Hitchcock et tant d'autres.

Quelques films marquants tournés aux studios: 
 

 Les Enfants du Paradis de Marcel Carné tourné en pleine guerre dans des conditions difficiles de semi clandestinité, manque de pellicule, techniciens menacés en permanence car juifs, ou résistants travaillant souvent sous de fausses identités, réfractaires au STO.
Interprètes: J-Louis Barreau, Arletty, Pierre Brasseur. 
Fanfan la Tulipe de Christian Jaque avec G Philippe, Fanfan, Gina Lolo Brigida, Adeline, Daniel Rocquevert le père d'Adeline.  
Jeux interdits de René Clément avec la jeune Brigitte Fosset. 




 La Main au Collet d'Alfred Hitchcock avec Gary Grant, Grace Kelly, Brigitte Aubert



La série des Gendarmes de Saint-Tropez de Jean Girault avec Louis de Funès. 



Le Corniaud de Gérard Oury avec Bourville et de Funès



Mon Oncle de et avec  Jacques Tati.



La Nuit Américaine de François Truffaut avec J Pierre Léaud, Catherine Bisset, J Pierre Aumont et François Truffaut 



François Truffaut c'est bien sûr la "nouvelle vague" termes inventés par Françoise Giroud, courant artistique qui est née au cours du festival de Cannes en 1957.

Et puis:
Atout Coeur à Tokyo pour OSS117 de Michel Boisrond 
L'armée des ombres de Jean-Pierre Melville   
Le Juge et l'assassin de Bertrand Tavernier
Le Bossu de Philippe de Broca

 Et tant d'autres… 
Quand on dit studio, ça ne veut pas dire tourné uniquement en studio. Très rapidement et autant que possible, les cinéastes ont envie de s'échapper des lieux clos que sont les studios. Le meilleur exemple est à Hollywood avec le genre qu'on a appelé films de parc. Lassés de travailler dans des décors uniques, un salon, un escalier, des portes et quelques accessoires ils vont envahir les jardins publics proches des studios. Ils y trouvent des allées, des bancs, des bosquets des bassins etc.. et des possibilités à l'infini. Et c'est également vrai pour Nice. 
Très rapidement on utilise dès que possible les décors naturels réservant aux studios ce qui trop compliqué dans la nature ou trop difficile d'accès. Car le studio coûte cher. Aujourd'hui pour des raisons économiques il redevient à la mode, car ce qui était gratuit jadis: voie publique, propriétés privées, monuments sont l'objet de taxation parfois hors de mesure. Aujourd'hui par exemple faudrait payer des droits importants à la SNCF pour tourner "l'arrivée du TGV en gare de La Ciotat." 

Et puis de nos jours la technologie numérique permet de modifier l'image en rajoutant ou en supprimant des éléments voire de tourner sans décor, devant un cyclo, fond vert ou bleu, le décor étant incrusté numériquement dans l'image plus tard en postproduction. Ira-t-on jusqu'à se passer les comédiens? Faire revivre les acteurs disparus? C'est tout-à-fait envisageable techniquement, mais est-ce souhaitable? Il n'empêche que la Provence d'aujourd'hui garde tous ses attraits si elle est techniquement moins indispensable.

   A suivre mardi 21 juin                                                   

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