mardi 9 septembre 2025

Les bains de mer en 1830

Au moment où la France se trempe et envahit les rivages, regardons un instant dans le rétroviseur. Comme on le sait, la pratique des bains de mer remonte au 19eme siècle - Avant on se contentait de tomber dans l'eau ou de s'y noyer. Mais et nous le savons aussi les usages modernes n'ont rien à voir avec la modernité du siècle des empires et des restaurations. 

Un petit texte issu d'un ouvrage de Joseph-Henri-Jules Bertaut, écrivain, historien  aujourd'hui oublié  pourtant auteur d'une impressionnante bibliographie. La postérité est bien ingrate. Il s'agit du " Faubourg Saint-Germain sous l'Empire et la Restauration." paru en 1949 chez Tallandier.

Situons la chose tout d'abord. Nous sommes aux alentours de 1830.  Les "Trois Glorieuses" signent le fin du règne de Charles X. Louis-Philippe le remplace. Le roi de France devient le roi des français. Tout est dans la nuance. Passons sur les détails. Mais cette nuance n'est pas du goût de l'arrière-garde des royalistes légitimistes qui monte "aux créneaux", prudemment et de manière mondaine. Ceux qu'on nomme les "ultras" sont avant tout des conservateurs, nostalgiques de l'ancien régime, frileux et bien élevés  et souvent désargentés. Leurs actions les plus extrêmes consistent principalement à vivre et à s'habiller à l'ancienne mode, à se recevoir et à circuler entre leur château, pour ceux qui en ont encore un et leur hôtel parisien, pour ceux qui en possèdent encore, à se bercer de nostalgies. 

Mais laissons le parole à  Jules Bertaut qu'on imagine narquois et la place à la duchesse de Berri :

" Tout le monde est à la mer, à ce moment, à Dieppe. C'est la plage à la mode, celle qui vient de lancer la duchesse de Berri  qui attire les gens, ordonne les promenades en mer, les fêtes dans les ruines du château d'Arques, porte des bijoux locaux, se démène comme un beau diable pour donner le ton à "sa" villégiature.

Le jour de l'ouverture de la saison, au premier bain, l'étiquette veux que l'on tire le canon au moment ou la duchesse entre dans la mer, accompagnée du médecin inspecteur. Le Dr Mourgué garde pour cette grande occasion son plus bel habit de ville avec son pantalon neuf; avant d'entrer dans les flots, il offre à la princesse sa main gantée de blanc, comme pour un bal; "C'est à mourir de rire" s'écrit Daniel Stern dans ses souvenirs. (1)


Ce premier jour passé, tout le monde reprend sa liberté, et la duchesse se baigne comme le commun des mortels. À ce moment, il n'y a pas encore les petites voitures traînées dans la mer et transportant baigneurs et baigneuses, comme l'usage s'en établira vingt ans plus tard. Tous ceux qui veulent se tremper dans l'onde amère sont portés dans les flots jusqu'à une certaine distance par de solides gaillards attachés à l'établissement qui les plongent et replongent et les ramènent au rivage sans leur laisser le temps de souffler. (...)

(1) Marie Catherine Sophie de Flavigny, dite Marie d'Agoult ou comtesse d'Agoult, aussi connue sous le pseudonyme de Daniel Stern, femme de lettres, amie de George Sand.


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