jeudi 14 septembre 2017

Notes de lecture

Les godillots, Manifeste pour une histoire marchée




Par Antoine de Baecque

Édit. : Anamosa 2017



C'est l'histoire d'une godasse, que dis-je? C'est de l'histoire tout court, qui commencerait en 1859 et se terminerait en 1968. Celle d'Alexis Godillot.

Antoine de BAECQUE est historien du cinéma, mais aussi de la randonnée, il nous raconte avec verve et bien illustrée l'épopée de cette chaussure révolutionnaire (si on accepte le mot pour le second Empire) : le godillot, qui continue à faire parler d'elle bien après sa disparition et sa relégation dans les vitrines des musées.

Nous avons ici déjà évoqué Alexis Godillot en tant que hyérois :

https://actionlondaise.blogspot.fr/2016/03/godillot.html

https://actionlondaise.blogspot.fr/2016/03/hyeres-annee-godillot.html


Dans cet essai on élargit le cercle.

Dans une première partie on apprendra que Godillot s'il n'est pas réellement l'inventeur de la célèbre "grolle" qui porte son nom, est l'industriel visionnaire qui su bien avant Taylor et Henry Ford rationaliser les procédures de fabrication, passer d'un artisanat industriel à une industrie performante et compétitive. Après cette première partie on oublie l'homme pour ne s'occuper plus que de la chaussure, qui perd sa majuscule en tombant dans le domaine populaire. Dans la chronologie, tout de suite il y a les chansonniers et les comiques troupiers, qui useront et abuseront de l'objet. Au passage signalons Raimu, le toulonnais, qui avant de devenir l'immense comédien qu'on sait s'est essayé au genre.

Suivra l'évocation d'une série de toiles de Van Gogh, "les souliers". Ici l'auteur convoque Heidegger et Dérida pour nous dire une rupture conceptuelle, pour nous entrainer dans une réflexion sur l'art : ce ne sont pas des natures mortes que l'on regarde, mais des autos-portraits de l'artiste. Les souliers sont le reflet de celui qui les porte, ils ont connu la boue, la route, la misère, le temps, celui qui passe et celui qu'il fait. Comme quoi il n'y a pas de sots objets.

Après ces envols philosophiques un atterrissage était nécessaire. Nous voici revenu sur le plancher des vaches pour une évocation de la marche à pied, non plus la marche forcée des troupes mais celle des excursionnistes, des scouts, des auberges de jeunesse du Front Populaire qui deviendront au fil du temps les randonneurs puis des trekkeurs en attendant autre chose! On pleurera la mort du godillot au lendemain de la seconde guerre mondiale, avec l'apparition des semelles en caoutchouc. Fini les chaussures à clous vive les vibrams ! Enfin pour parfaire le tour d'horizon, il fallait bien dire un mot des godillots du général de Gaulle. Non pas des "pompes" élyséennes mais des députés d'une Vème république naissante.

Un livre aussi drôle qu'instructif. À lire de toute urgence même si vous n'aimez pas la marche et ne portez que des tongs.

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